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N°56 Art.2 "L’industrie brésilienne du Erva Mate "

Portrait de Juliana Motagner, Directrice Générale chez Ximango Ltda.
 Dans l’Etat du Rio Grande do Sul, le plus méridional du Brésil, bordé par l’océan Atlantique, l’Argentine et l’Uruguay, se trouve le centre de la culture du mate. En remontant la vallée du Taquiri, à 200 km environ de Porto Alegre, après Lajeado, on arrive à Ilȯpolis le cœur des près de 31.000 ha plantées de l’Etat RS, en petite partie encore forêt sauvage, le restant planté par l’homme depuis environ deux ou trois générations.

 IBRAMATE, l’Instituto Brasileiro da Erva-Mate, chiffre à 433.635 tonnes la production brésilienne en 2013, reparti entre le Rio Grande do Sul : 43%, le Paranà : 45% et Santa Catarina : 12%. www.ibramate.com.br

Dans les cantons d’Ilȯpolis et d’Arvorezinho sont installées une dizaine d’unités industrielles, qui transforment les feuilles et branches récoltées soit  par les fermiers sur des terres qui leur appartiennent en propre, soit par des ouvriers agricoles sur les terres des industriels. Crée par Valcir Montagner, dont les grands parents sont arrivés de l’Italie du Nord au siècle dernier, la Société Ximango Industria de Erva Mate Ltda. est parmi les plus grandes et les plus anciennes.
des feuilles jusqu'au  chimarrao 

 L’usine est actuellement en cours d’agrandissement, preuve que le marché est porteur et  occasion pour innover. Juliana Montagner, ingénieur agronome et diplômée de gestion et de marketing, a rejoint la société de son père après un superbe début de carrière en Italie " à trente ans j’ai voulu rentrer dans mon pays, et appliquer mon savoir faire et mes idées dans la belle entreprise de mon père  à une condition : qu’il m’accorde les pouvoirs nécessaires" dit cette belle jeune femme blonde ultra dynamique avec un grand sourire….."et il m’a ouvert grandes ses portes, heureux de mon retour".
Juliana au stand de la Ximango avec un vendeur

Dans cette région rurale la vie est douce, les villes sont petites et groupées autour de grandes églises, on se parle souvent en italien ou en allemand, la majorité des habitants sont originaire de familles arrivées de l’Europe depuis plusieurs générations. Le dimanche Juliana répète  avec les enfants des fermiers qu’elle a regroupés dans une chorale à l’église : on ne peux pas faire 10 pas avec elle dans la rue, sans qu’un enfant ne lui saute au cou. Arrivée au bureau elle retrouve une superbe autorité et explique les dernières innovations dans le processus de fabrication : Ximango vient d’installer un nouveau tunnel de séchage, développé en Argentine, qui est alimenté en bois broyé, à la place des gros troncs habituels, ce qui a presque totalement éliminé la fumée, assure une température de chauffe continue et  sans à pics et permet un séchage plus en douceur et sans agglomération des feuilles et branches, il y a de ce fait économie d’énergie, moins d’émission de CO2, une meilleur qualité du produit travaillé . Les murs de la salle de stockage sont doublés en lattes d’araucaria, ce qui stabilise la température et accélère la maturation du mate brut ; 
une nouvelle chaîne d’emballage permet l’ensachage du produit fini sous vide, doublant ainsi la durée du stockage, mais, hélas, dit elle , cette automatisation a remplacé quelques postes de travail. Dans la salle de réunions sont affichés les nombreux certificats de qualité, prix et autres trophées. Parmi ces cadres une photo du Pape François, qui tient un paquet de Mate Ximango entre ses mains, cadeau remis lors de son accueil au Brésil. Par ailleurs Juliana explique que l’arbre à mate est un bon dévoreur de CO2, avec 1ha d’arbres standards  capturant environ une tonne de CO2 ; seulement une partie des plantations qui appartiennent à  Ximango est utilisée pour compenser les 504,6 t émises par l’usine, l’entreprise est donc certifiée « carbon neutral » et elle a du crédit carbone  à vendre.
Juliana a de nombreux projets de diversification, et c’est vrai que l’on trouve déjà des alicaments et des  cosmétiques au mate sur le marché. Juliana s’intéresse aussi énormément aux thés de toute sorte et elle étudie la plante, sa culture, ses propriétés et ses tasses, pour voir comment tirer avantage des très nombreuses similitudes et convergences entre le camellia sinensis et ses variétés  et les ilex paraguariensis, dont on a déjà classifié plus de 60 variétés dans les forêts et plantations. Ainsi son père explore et enregistre depuis de longues années  les différences botaniques, comme la taille et les nuances de couleur des feuilles  ainsi que la sapidité et les notes de saveur du breuvage. Ces observations les ont convaincus que le meilleur goût est obtenu des récoltes provenant d’arbres qui poussent dans un rayon d’une trentaine de km autour d’Ilȯpolis, où se trouve encore un stock important d’arbres originels. 
entourée de confrères 
Ces constats ont incité Juliana d’explorer une approche IGP – Indication Géographique Protégée- pour cette région de production, qu’elle considère comme patrimoniale. Elle s’est par ailleurs fortement  investie au sein de la   fédération professionnelle  de la filière,  la première femme dans ce rôle de leader, et on l’écoute fort bien, « car elle connaît parfaitement ses dossiers et ses idées sont toujours innovantes ».
Un pays aux grandes espaces, avec une agriculture intéressante et une population jeune et dynamique, en somme un marché immense où il y a de la place pour de nouvelles idées, Juliana ne regrette pas d’y être retournée.


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